Tout savoir sur les protéines animales et végétales…

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Newsletter Acti 09.06

Cher lecteur, chère lectrice,

la question du mode alimentaire est aujourd’hui au cœur des préoccupations d’une grande partie de la population. Manger sain et équilibré est un objectif très largement partagé. 

Les messages nutritionnels omniprésents nous recommandent de manger bio, local, frais… Et aussi de manger moins de viande. Les protéines animales n’ont plus la côte, au point que certains décident de ne plus en manger du tout et de les remplacer par des protéines végétales.

Végétarien, végétalien, végan… Tous ces termes désignent les personnes qui, chacune à sa manière (voir ci-dessous l’interview du Dr Rougier), essaient de ne plus consommer de viande, ou même parfois de produits d’origine animale quels qu’ils soient.

Ces notions, plus complexes qu’il y paraît, demandent quelques explications car de nombreuses questions se posent. A commencer par celles-ci : pouvons-nous nous passer de protéines ? A quoi servent-elles ? Comment assurer un apport correct lorsqu’on ne mange plus de viande ?

La première question appelle une réponse claire : non, nous ne pouvons pas nous passer de protéines ! Elles constituent les briques fondamentales de la vie. Elles assurent d’innombrables fonctions dont nous ne pouvons nous passer.

Les produits animaux constituent la première source de protéines, mais ce n’est pas la seule. Pour qui veut s’en passer, le monde végétal représente lui aussi une excellente source de protéines, à condition de bien savoir les choisir et les combiner.

Les Humains font partie de la classe des omnivores, au même titre que le porc, l’ours ou le hérisson. Notre système digestif et notre métabolisme sont capables de se nourrir d’aliments animaux et végétaux. Cela ne signifie pas que nous devons manger de la viande, mais juste que nous pouvons le faire. 

Cette capacité a permis à nos ancêtres, au fil des millénaires, d’adapter leur régime alimentaire à leur environnement. Une chance par rapport à d’autres espèces, qui a contribué à l’évolution des hommes dans les temps lointains où la quête de nourriture posait de nombreuses difficultés. 

Aujourd’hui, tout a changé. Nous avons la chance (encore une !) de pouvoir maîtriser notre alimentation en choisissant les types d’aliments qui nous conviennent le mieux. A commencer par les aliments protéinés.

Avant de pousser plus loin la réflexion sur ces modes alimentaires sélectifs, commençons par faire plus ample connaissance avec les protéines et leurs composants principaux, les acides aminés.

Pourquoi avons-nous besoin de protéines ? 

Manger suffisamment de protéines nous permet d’abord de régénérer notre masse musculaire. C’est la première chose qui nous vient à l’idée lorsqu’on parle de protéines, sans doute à cause de la corrélation qui s’installe spontanément dans notre tête : manger de la viande (donc du muscle) permet de nourrir les muscles. 

La réalité est à la fois plus complexe et plus riche. Les protéines font partie des trois classes de macronutriments indispensables, avec les glucides (contenus dans les végétaux) et les lipides (fournis surtout par les matières grasses). Elles interviennent directement dans le renouvellement de nos cellules musculaires, mais aussi dans un très grand nombre d’autres fonctions. 

Notre corps est composé à plus de 60% d’eau. Si l’on considère uniquement sa matière sèche (en excluant donc l’eau), on s’aperçoit que celle-ci est composée pour plus de la moitié par des protéines. Nous en avons dans les muscles, bien sûr, mais aussi dans les os, la peau, les organes, les ongles, les hormones… Même les ovules et les spermatozoïdes en renferment. 

Pour fabriquer de l’énergie, chacune de nos cellules a besoin de protéines. C’est au cœur d’une petite centrale autonome, la mitochondrie, que la cellule produit sa propre énergie à partir de l’oxygène fourni par la respiration, du glucose apporté par l’alimentation, et des protéines qui assurent le bon fonctionnement de l’opération. 

Voilà déjà un impact plus global. Tout comme celui qui suit : sans protéines, notre corps est incapable de produire normalement ses hormones. Or, ce sont des agents essentiels de la vie qui acheminent en permanence les messages biologiques et biochimiques d’un bout à l’autre de l’organisme.

Parmi les hormones les plus importantes, citons l’insuline qui régule le taux de sucre dans le sang, les neurohormones (dopamine, sérotonine…) qui font circuler les informations dans le système nerveux, l’adrénaline qui nous permet de réagir aux situations de stress ; les hormones sexuelles qui nous permettent de nous reproduire ; les hormones thyroïdiennes qui orchestrent le bon fonctionnement de l’organisme… Toutes ont besoin de protéines.

Sans protéines, les innombrables réactions enzymatiques qui se déroulent à chaque seconde, dans les coulisses de notre corps, ne pourraient avoir lieu. Car nos enzymes, qui se comptent par centaines, ont besoin elles aussi de protéines. 

Ce ne sont que quelques exemples. Les protéines exercent leur activité au cœur même de nos cellules, de nos tissus, de nos organes… Elles participent à toutes nos fonctions, ou presque. Comment font-elles ? Elles peuvent compter sur l’efficacité des petites unités qui le composent : les acides aminés.

Nos amis, les acides aminés…

Vous le voyez, le rôle des protéines dépasse largement le cadre du tonus musculaire. C’est l’ensemble de nos fonctions qui risque de pâtir d’un apport protéiné insuffisant ou partiel. Pour le comprendre, plongeons quelques instant au cœur même des protéines.

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Masterclass Micro-Nutriments du Dr. Yann Rougier où il y aborde les acides aminés (7:25)

Qu’elle soit d’origine animale ou végétale, une protéine se présente comme une construction dont les briques sont des petites unités imbriquées les unes dans les autres : les acides aminés.

Chaque acide aminé est un assemblage de carbone, hydrogène, azote et oxygène. Ils se différencient par la manière dont ces éléments sont agencés. La nature a ainsi donné naissance à plusieurs centaines d’acides aminés, dont seulement 22 sont impliqués dans la vie de notre organisme. 

Notre corps sait fabriquer certains de ces acides aminés en recombinant leurs éléments de base, mais ce n’est pas le cas pour d’autres. Notamment pour 9 d’entre eux qui sont dits « essentiels » car nous en avons absolument besoin. Force est donc de les puiser dans l’alimentation quotidienne. Nos besoins en protéines viennent de là. 

A titre d’exemple, voici une rapide présentation de certains acides aminés majeurs qui participent à notre équilibre et à notre santé.

  • L’isoleucine : elle intervient dans la production d’énergie, le renouvellement musculaire (notamment au niveau du cœur, qui est un muscle), le stockage graisseux, la cicatrisation des tissus, la formation de l’hémoglobine. Et même dans notre humeur, car les neurohormones cérébrales renferment elles aussi de l’isoleucine.
  • La leucine : elle a les mêmes sphères d’action que la précédente, qu’elle seconde dans de nombreuses situations. En complément, elle intervient dans les phénomènes douloureux et dans la gestion du taux de sucre sanguin.
  • La valine : aux activités des deux précédentes, elle ajoute une action dépolluante sur le foie, qui assure en permanence le nettoyage de notre sang afin d’éliminer les substances indésirables.
  • La lysine : cet acide aminé possède une sphère d’action principale : la peau. Il est nécessaire à la production du collagène, qui assure l’élasticité et la souplesse de la peau et des tissus articulaires. Une consommation suffisante de lysine contribue à atténuer les signes du vieillissement cutané.  Enfin, cet acide aminé intervient dans la production des cellules immunitaires, et donc dans notre défense contre les agresseurs microbiens.
  • La méthionine :  cet acide aminé possède un effet détox majeur. Il intervient directement dans l’élimination de nombreux déchets et substances indésirables, à commencer par les métaux lourds dont l’accumulation dans l’organisme est source de troubles. En prime, il contribue à l’entretien des articulations en stimulant la régénération du cartilage. Enfin, la méthionine contribue à abaisser dans l’organisme le niveau d’histamine, une substance responsable des réactions allergiques. 
  • La phénylalanine : c’est un acide aminé majeur, indispensable à la production de l’insuline, cette hormone chargée de réguler le taux de sucre dans le sang. Elle participe donc à la prévention du diabète. Outre son action sur la peau, la production d’énergie et le tonus musculaire, la phénylalanine agit au niveau psycho-émotionnel, en participant à la production des neurohormones cérébrales qui transportent les messages nerveux dans le cerveau. Le manque de phénylalanine se traduit par une plus grande sensibilité au stress et des accès de déprime. Enfin, cet acide aminé fait partie de notre arsenal naturel anti-douleur puisqu’il s’oppose à la dégradation des endorphines, ces hormones qui ressemblent à la morphine et modulent les messages douloureux. 
  • Le tryptophane : il agit de manière privilégiée au niveau du cerveau. Le tryptophane est le garant de notre stabilité psycho-émotionnelle et de notre sommeil. Il est indispensable à la production cérébrale de sérotonine, le neurotransmetteur de l’apaisement et de la bonne humeur. Le tryptophane intervient ainsi dans l’équilibre de l’humeur, la qualité du sommeil, la résistance au stress… 

Des protéines : oui, mais lesquelles ?

La cause est entendue : nous avons un absolu besoin de protéines et celles-ci doivent nous être fournies par l’alimentation. Se pose alors la seconde question cruciale : quelles protéines choisir ? Végétales ou animales ? 

Ce propos ne cesse d’agiter les consciences, au point qu’une nouvelle notion a émergé récemment : le flexitarisme. Ce néologisme désigne le fait d’alterner, dans son alimentation quotidienne, des protéines animales et végétales en quantité raisonnable, sans en exclure aucune. 

Un petit point s’impose. Sur le plan de la santé, l’essentiel est, en premier lieu de fournir au corps suffisamment de protéines, qu’elles soient d’origine végétale ou animale. C’est donc la qualité des protéines qui compte. Et sur ce point, il y a des différences.

La plus importante : toutes les protéines d’origine animale fournissent au corps les 9 acides aminés essentiels, alors que les protéines végétales manquent toutes (ou presque) de certains d’entre eux. Cependant, comme la nature est bien faite, les acides aminés manquant dans les céréales sont présentes dans les légumineuses, et vice-versa. Or, ce sont les deux sources principales de protéines animales. Conclusion : lorsqu’on désire se passer de protéines animales, il faut veiller à mélanger ces deux sources végétales afin de couvrir l’éventail des apports. 

On est aussi en droit de se demander pourquoi éliminer la viande, qui s’avère une source de protéines plus simple à gérer au quotidien. La réponse est double. D’abord, les protéines animales génèrent, au cours de l’assimilation, davantage de déchets que les protéines végétales. Le corps doit donc fournir un surcroît de travail pour les éliminer.

La seconde raison est d’ordre environnemental. Opérons un petit retour en arrière, jusqu’au milieu du siècle dernier. Après les privations de la dernière guerre mondiale, la consommation de viande s’est démocratisée. D’aliment « de riche », elle est passée au rang d’aliment « pour tous ». Peu à peu, elle s’est imposée au point qu’aujourd’hui, nous en consommons beaucoup trop.

Ce qui pouvait, au départ, être considéré comme une avancée sur le plan sociétal, est devenu un véritable problème sur le plan environnemental. Car pour élever tous les animaux que nous consommons dans les sociétés occidentales, il a fallu y consacrer des surfaces très importantes. S’ajoute à cela l’énorme consommation d’eau nécessaire à l’élevage des animaux. 

Aujourd’hui, on compte que plus de 60% des terres cultivables du globe sont occupées par l’élevage, au détriment parfois des cultures vivrières.  En outre, pour produire 1 kg de bœuf, il faut consommer plus de 15.000 litres d’eau, alors que pour 1 kg de céréales, moins de 1500 litres suffisent. 

Enfin, pour produire 1 kg de viande, il faut que l’animal consomme 7 à 10 kg de céréales. Or, il y a plus de protéines assimilables dans ces 10 kg de céréales que dans le petit kg de bœuf obtenu à l’arrivée. Sur le plan environnemental, la consommation exagérée de protéines animales a donc un coût très important

S’ajoute à cela une dimension quasi-philosophique : aujourd’hui, certains refusent de manger des animaux pour des raisons de respect de la vie. Toutes ces objections sont entendables. C’est à chacun de déterminer sa position à ce sujet en fonction de ses besoins, mais aussi de sa vision du monde et de ses priorités.

Résumons : nous avons un besoin permanent mais mesuré de protéines ; nous pouvons les puiser dans les aliments animaux ou végétaux ; la consommation excessive de viande fait peser un poids important sur l’environnement. Nous devons donc, tous, reconsidérer la manière dont nous fournissons à notre organisme les protéines dont il a besoin. 

Plusieurs solutions sont à notre portée :

  • Nous pouvons consommer de la viande de manière raisonnable, sans excès, et varier les sources de protéines animales en intégrant du poissons, des crustacés, des œufs… 
  • Nous pouvons aussi décider d’exclure les aliments protéinés d’origine animale et nous concentrer uniquement sur les protéines végétales. 

Dans un cas comme dans l’autre, cela demande quelques adaptations au niveau des habitudes nutritionnelles quotidiennes.

Au jour le jour…

Nous voilà arrivés au cœur du sujet : comment faire, au quotidien, pour assurer un apport suffisant en protéines, sans excès et en respectant ses propres choix ? 

Pour le comprendre, revenons un peu en arrière. Lorsque vous absorbez un aliment protéiné, quel qu’il soit, votre organisme récupère les protéines, puis les « casse » pour libérer tous les acides aminés. Ensuite, l’organisme va puiser dans ce capital les acides aminés dont il a besoin pour assurer telle ou telle opération, voire les recombiner en fonction de ses besoins.

Nos apports en protéines doivent donc être réguliers. Nous devons en absorber chaque jour en quantité raisonnable, ni trop ni trop peu. Ensuite, le choix des aliments et les quantités à absorber diffèrent selon que l’on désire mixer les sources de protéines ou exclure celles d’origine animale.

  • Lorsqu’on désire continuer à manger des protéines animales : il suffit de limiter les quantités quotidiennes, et de varier les sources. Nous n’avons besoin que de 80 à 100 g par jour (au repas du midi de préférence) pour couvrir vos besoins. Soit : un œuf, une côtelette d’agneau, un filet de poisson blanc, 6 huîtres, un petit bol de crevettes… Le reste de vos repas peut être constitué de végétaux : légumes, fruits, pâtes, riz… 
  • Si vous désirez consommer uniquement des protéines végétales : avant tout, il faut qu’une fois par jour vous mangiez un mélange de céréales et de légumineuses : riz et lentilles, couscous et pois chiches, maïs et haricots rouges… C’est ce qui vous fournira tous les acides aminés essentiels dont votre corps a besoin.

Comptez 2/3 de céréales pour 1/3 de légumineuses, par exemple 100 g de riz cuit et 50 g de lentilles vapeur.

Légumineuses
La place particulière des légumnineuses dans notre alimentation – École 5.3
  • Certains aliments végétaux (rares) renferment tous les acides aminés essentiels. C’est notamment le cas du quinoa, qu’il n’est pas nécessaire d’associer à des légumineuses.

Vous le voyez, à l’arrivée, les solutions sont simples. Il nous suffit d’être raisonnable, mesuré, attentif à nos besoins… Sans qu’il soit nécessaire pour autant de bouleverser son alimentation ni de forcer ses convictions sur le plan écologique et philosophique !

Trois questions à Yann Rougier 

Dr-Yann-ROUGIER
Le Dr Yann Rougier, Médecin Spécialiste et neurobiologiste

«  Il n’y a ni aliment « parfait » ni aliment « maudit » ! »

Dr Yann Rougier, Médecin Spécialiste

On entend parler aujourd’hui de végétarisme, végétalisme, véganisme… Pouvez-vous nous préciser les différences ?

Le végétarisme n’est pas une pratique récente. Dans certaines régions du globe, comme l’Inde, la population est largement végétarienne. Cela signifie seulement qu’ils ne mangent pas de viande. Les végétariens peuvent manger des œufs, des produits laitiers, des produits de la mer… Ils mélangent ainsi les sources de protéines animales et végétales, en excluant totalement la viande. Le végétalisme va plus loin. Les végétaliens excluent de leur alimentation tous les produits animaux pour se nourrir exclusivement de végétaux : ni œufs, ni laitages…. Enfin, le véganisme ajoute à cela une dimension supplémentaire : ils refusent l’utilisation de produits émanant du monde animal, sans distinction. Ils excluent ainsi le miel car il est produit par les abeilles ou le cuir provenant de la peau des animaux. 

L’un de ces modes alimentaires est-il supérieur aux autres ?

Sur le plan strictement nutritionnel, l’idéal est de privilégier la variété. Je dirais donc que les flexitariens, qui mangent des protéines animales en petite quantité, ont un mode alimentaire très cohérent. D’autant que des chercheurs ont fait récemment une découverte intéressante : il semble que le fait d’intégrer à un repas une petite (et même toute petite) quantité de protéines animales facilite l’utilisation par l’organisme des protéines végétales absorbées au cours du même repas. 

Cependant, il est possible d’être végétarien et en parfaite santé, à condition de bien combiner les sources de protéines. Pour les végétaliens et les végan, il faut aussi veiller à suivre régulièrement des cures de certains nutriments rares dans le règne végétal, comme la vitamine B12.

Tous les discours affirmant que la viande est mauvaise pour la santé sont donc erronés ?

Votre terme n’est pas le bon. Disons qu’ils doivent être mesurés. Les aliments d’origine végétale sont une excellente source de vitamines et de minéraux, beaucoup plus abondants et variés que dans les produits animaux. Les végétaux fournissent aussi des glucides indispensables. Côté animaux, les produits de la mer (poissons, coquillages, crustacés…) fournissent de bons acides gras (Omega 3) alors que la viande apporte plutôt des graisses saturées néfastes pour les artères lorsqu’elles sont trop abondantes. Mais cette dernière est aussi une source de vitamine B12, quasiment absente du règne végétal. Comme vous le voyez, il n’y a ni aliment « parfait » ni aliment « maudit ».

Plusieurs choix sont donc possibles sur le plan nutritionnel. L’essentiel est de ne jamais perdre de vue qu’une alimentation variée est un gage de santé et d’équilibre !

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