A la découverte de l’horloge biologique et tous ses secrets (lettre)

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L'horloge biologique et tous ses secrets

Chaque jour, dans notre corps, toutes nos fonctions biologiques et métaboliques suivent un agenda précis. La chronobiologie, la science qui étudie l’impact du temps dans notre fonctionnement corporel, en a dessiné les contours avec précision. Explorons donc les secrets de notre horloge biologique.

C’est à la suite d’un débat houleux avec ma fille de 15 ans, Maïlé, que je me suis sérieusement intéressé au fonctionnement de l’horloge interne. En qualité de papa bienveillant et toujours soucieux de son état de forme le matin au lycée, je lui reprochais de s’éterniser, la nuit venue, sur son téléphone mobile pour envoyer des textos à ses camarades.

Vous connaissez les ados : ils font mine d’aller se coucher tôt et en profitent pour rester rivés sur leur écran de portable jusqu’à pas d’heures. Je ne manquais par d’arguments en la matière car il est bien connu (et même scientifiquement démontré) que la consultation des écrans, qu’il s’agisse d’ordinateurs, de mobiles, de tablettes ou de télé, correspond à une exposition massive qui retarde considérablement l’arrivée du sommeil.

Pourtant ma très chère fille avait soigneusement préparé sa réplique. Pour me scotcher sur place, elle me cita une étude récente réalisée par les chercheurs américains ayant obtenu le prix Nobel de Médecine 2017. Cette étude attestait que chez l’adolescent, l’heure du coucher est retardée à cause d’une horloge biologique plus lente. Mais que voulez-vous donc répondre à cela ?

Persuadé d’une escroquerie habile, j’ai vérifié le lendemain sur Wikipedia et découvert, à ma grande stupeur, l’identité des scientifiques nobélisés (Jeffrey Hall, Michael Rosbash et Michael Young). Et j’en ai surtout profité pour me familiariser avec cette science étonnante qu’est la chronobiologie et cette fameuse horloge biologique qui semble à la fois donner le tempo à l’organisme et l’autorisation aux ados de se coucher tard.

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En vidéo : la conférence pour réajuster son horloge biologique avec Dr Yann Rougier et Marie Borrel

Nous vivons à rebrousse-rythme !

Hippocrate disait déjà, quatre siècles avant notre ère : « Avec les saisons, les maladies de l’homme comme ses organes subissent des modifications ». C’est vrai, le père de la médecine occidentale avait pressenti que notre organisme est soumis au rythme des saisons. Mais ce n’est pas tout.

Chaque jour, dans notre corps, toutes nos fonctions biologiques et métaboliques suivent un calendrier précis. La chronobiologie, la science qui étudie l’impact du temps dans notre fonctionnement corporel, en a dessiné les contours avec précision.

Cette discipline nous affirme aussi que plus nous sommes en phase avec ces rythmes internes, plus nous préservons notre tonus, notre bonne humeur et même notre santé. Or, nous sommes très souvent en décalage.

Prenons un exemple simple. En hiver, les journées sont plus courtes et la lumière naturelle moins intense. Ce devrait être une période de repos. A l’inverse, en été, lorsque les jours s’allongent et que la lumière s’intensifie, les conditions sont réunies pour une activité intense.

Que se passe-t-il dans notre société ? Nous travaillons beaucoup en hiver pour pouvoir prendre nos vacances en été, histoire de profiter du beau temps et de la chaleur. Nous vivons ainsi à rebrousse-rythme ! Ce qui entraîne fatigue, nervosité, baisse de moral, troubles du sommeil et de l’appétit…  

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Une journée, une semaine, un mois, une saison…

Notre corps suit des rythmes divers. Les plus importants sont les rythmes « circadiens » qui se déroulent à l’intérieur d’une journée. Petite précision : ces rythmes ne sont pas calés sur 24 heures, mais sur une durée généralement un peu plus longue (jusqu’à 25 heures), parfois un peu plus courte (autour de 23 heures). Chacun de nous possède ses rythmes propres.

Les chercheurs l’ont constaté en observant des spéléologues qui passaient plusieurs semaines sous terre, totalement coupés des conditions extérieures, notamment du rythme lumière/obscurité. Leur vie se désynchronisait progressivement pour se caler sur leur propre horloge biologique interne.

A cela s’ajoutent des rythmes ultradiens dont le cycle est plus court (quelques heures) et des rythmes infradiens dont le cycle est plus long (un mois, une saison…). Bref : notre corps ne suit pas la flèche du temps, mais il s’adapte en permanence à des cycles ayant une durée variable.

Il n’en demeure pas moins que les rythmes circadiens (sur une journée) sont au centre de notre fonctionnement corporel. Chaque soir, nous le percevons clairement lorsque nous nous endormons. Chaque matin, il en est de même lorsque nous nous réveillons. A cette organisation veille/sommeil s’ajoute  l’alternance entre la faim qui nous pousse à manger et la satiété qui nous incite à arrêter, ou celle qui nous commande de nous reposer après une période d’activité.

Jusque là, rien de très étonnant. Ce qui l’est davantage, c’est l’ensemble des rythmes qui cadencent toutes nos activités biologiques et métaboliques : le renouvellement cellulaire, la gestion du taux de glucose dans le sang, les variations de la pression artérielle, la fluctuation de notre température interne (en dehors de toute fièvre)… Et surtout, la sécrétion de nos hormones. C’est par intermédiaire de ces messagères hors pair que nos horloges corporelles impriment leurs cadences dans notre corps.

Où se niche l’horloge biologique centrale ?

Avant de plonger dans les rouages intimes de notre organisme, une question se pose : où se niche l’horloge biologique centrale ? Elle se cache dans notre cerveau, au cœur d’une toute petite structure double : les noyaux suprachiasmatiques. Sous ce nom étrange se cache une véritable petite pendule, réglée au départ de manière génétique. C’est elle qui détermine notre « chronotype ». C’est elle, par exemple, qui nous fait couche-tôt ou couche-tard, lève-tôt ou lève-tard. Sur cette programmation initiale, nous n’avons pas beaucoup de prise.

Mais sur cette base immuable s’inscrivent nombre de modulations : les habitudes prises pendant l’enfance, la région où nous avons grandi (plus ou moins ensoleillée), les horaires imposés des repas en famille… Ce sont autant de facteurs qui ont construit au fil des années notre adaptation personnelle aux rythmes extérieurs. Et sur ces derniers, nous pouvons agir.

La lumière : un synchroniseur majeur et un médicament

Ces horloges internes s’ajustent en permanence sous l’effet d’un élément majeur : la lumière. C’est notre principal synchroniseur de rythme. En premier lieu, c’est elle qui recale nos horloges pour les adapter à la durée du jour, qui varie sans cesse au cours de l’année. La lumière naturelle pénètre dans nos yeux. Elle est ensuite conduite par des voies nerveuses particulières jusqu’à notre petite horloge centrale, qui se recale au jour le jour.

Cette même lumière peut devenir un « désynchroniseur » de rythme lorsqu’elle vient à manquer, comme c’est le cas en hiver dans les pays nordiques où les jours raccourcissent au point de ne durer que quelques heures. Cette carence lumineuse entraîne une altération du sommeil, ainsi que des troubles de l’humeur. C’est dans ces pays que les dépressions hivernales sont les plus fréquentes.

Heureusement, la lumière (encore elle !) peut devenir un médicament. Lorsque la nature devient avare en rayons lumineux, le fait de s’exposer devant une lampe qui diffuse une lumière à l’intensité proche de celle du soleil permet de compenser ces manques. Les lampes habituelles qui éclairent nos rues et nos habitations n’est pas assez puissante.

Songez : en plein soleil, en été, nos yeux reçoivent plus de 50.000 lux (c’est ainsi que l’on mesure l’intensité lumineuse). Dans une pièce très éclairée, nous en recevons moins de 1000. C’est pourquoi certains fabricants mettent à disposition des lampes spécialement conçues pour effectuer, à la maison, des « bains » de lumière destinés à compenser la carence lumineuse pour les personnes très sensibles.

Mais dans notre pays, tout le monde n’en a pas besoin, loin de là… Sauf dans des situations très précises. Au retour d’un voyage qui vous a conduit à l’autre bout de la terre en vous faisant franchir plusieurs fuseaux horaires, ce type de traitement permet de souffrir moins longtemps du jet-lag.

Les autres synchroniseurs de rythme

D’autres synchroniseurs de rythme peuvent aider à éviter les désagréments les plus courants. L’activité physique en fait partie lorsqu’elle est pratiquée de manière régulière, au même moment de la journée. Elle produit dans le corps des réactions physiologiques qui, lorsqu’elles se répètent avec régularité, impriment une cadence à notre organisme.

Le rythme des repas contribue également à la synchronisation de l’horloge biologique, pour peu qu’il soit assez stable. Tant que l’on mange à des heures régulières, en phase avec les sécrétions hormonales qui gèrent l’appétit et la satiété, la digestion et l’assimilation des repas, notre comportement alimentaire contribue à la stabilité de nos rythmes internes. Quelques écarts sont alors possibles, sans que toute la machine se dérègle.

A l’inverse, manger n’importe quand (et n’importe quoi !) entraîne l’effet inverse. Les innombrables opérations qui nous permettent de digérer les aliments et d’assimiler les nutriments qu’ils contiennent finissent par dérégler l’ensemble du système. Les messagers de la faim et de la satiété sont déboussolés et le cerveau ne reçoit plus correctement les informations qu’ils sont sensés transmettre (voir ci-dessous l’interview du Dr Rougier).

Par ailleurs, le stress perturbe  les rythmes biologiques. Un stress brutal et violent déclenche des sécrétions hormonales destinées à faire face à la situation. Tant qu’il reste ponctuel, l’organisme sait retrouver son rythme naturel une fois l’orage passé. Mais ces stratégies naturelles ne sont pas adaptées aux stress insidieux et répétés. Conséquence : ces derniers finissent par déséquilibrer l’horloge biologique dans son ensemble.

Vous le voyez : tout ce qui contribue à dérégler notre horloge biologique (manque de lumière, activité physique désordonnée, repas anarchiques, stress chronique…) peut devenir la solution aux problèmes posés. A condition de remettre de l’ordre dans le programme : manger et bouger à des heures régulières, mieux gérer son stress… Et même pratiquer des bains de lumière lorsque c’est nécessaire.

Les hormones, toujours les hormones…

La majeure partie de nos rythmes biologiques est gérée par nos hormones. Elles sont comme des lettres que l’organisme associerait pour former des mots, puis des phrases, puis des livres entiers.

Si les noyaux suprachiasmatiques donnent le tempo, ce sont les hormones qui vont avertir les organes et les systèmes concernés qu’il est temps de se livrer à telle ou telle activité. Voici quelques extraits de la pièce qui se déroule en secret, dans les coulisses de votre corps, au cours d’une journée banale.

  • 7 h : le réveil sonne. Cela fait déjà deux heures que vos glandes surrénales ont commencé à sécréter du cortisol pour stimuler la production d’énergie au cœur de vos cellules. La mélatonine, hormone du sommeil, a commencé à refluer depuis le milieu de la nuit pour lui laisser la place. Côté alimentation, vous n’avez rien avalé depuis environ 12 heures et votre organisme a besoin de carburant. C’est la ghréline qui avertit votre cerveau qu’il est temps de donner l’ordre de manger. Votre appétit se réveille et la faim vous titille.
  • 9 h : vous êtes prêt à l’action. Vous ressentez le besoin d’agir.  C’est l’heure où vos hormones thyroïdiennes sont au top. Elles sont sécrétées par votre glande thyroïde, sous contrôle de l’hypothalamus et de l’hypophyse.
  • Midi : votre ventre gargouille. La ghréline, produite dans l’estomac, avertit votre cerveau qu’il est l’heure de manger. Le cortisol amplifie le message. Et vous ressentez cette impression quotidienne de « ventre creux » qui n’est en rien lié à son taux de remplissage. Dès que vous aurez absorbé suffisamment de nourriture, votre cerveau sera tenu informé par une autre hormone, la leptine, qui vous coupera l’appétit.
  • Fin du repas : vous vous sentez fatigué. Vous avez besoin d’une petite parenthèse de calme, voire d’une courte sieste. Rien de plus normal. On attribue souvent cette torpeur « postprandiale » (qui suit le repas) à la digestion qui mobilise une partie de l’énergie disponible. La réalité est différente. C’est votre horloge biologique qui vous incite à prendre un peu de repos en diminuant la production de cortisol. Après un court laps de temps (entre 15 et 30 mn selon les individus), une sécrétion d’adrénaline vous remettra sur pieds pour l’après-midi et vous rendra toute votre efficacité.
  • Début d’après-midi : votre tonus remonte. Votre horloge biologique continue à rythmer votre journée en accentuant la production d’adrénaline qui connaît son pic vers 16h30/17h. Le cortisol est encore de la partie, même s’il n’est pas sécrété en grandes quantités à cette heure. Il sert d’appoint à l’adrénaline et amplifie son effet. C’est surtout votre cerveau qui est boosté par ce mécanisme : vous avez l’esprit clair, vous vous sentez prêt à réfléchir efficacement, à vous plonger dans un dossier délicat… Profitez-en.
  • 18 h : la journée de travail touche à sa fin. Votre capacité de concentration décline progressivement. Ce n’est pas le cas de votre forme physique. Vos muscles renferment une petite réserve de sucre (du glycogène) qui est rendue disponible à ce moment-là. Un flux de testostérone, produit par les glandes surrénales (que vous soyez homme ou femme) stimule encore votre énergie musculaire. C’est le moment idéal pour une petite séance de piscine, de vélo ou de footing. Au bout d’une trentaine de minutes d’efforts, votre hypothalamus commencera à produire d’autres hormones à l’effet antidouleur, euphorisant et anxiolytique : les endorphines. Elles vous aideront à prolonger votre séance sportive. Vous en sortirez physiquement fatigué, mais l’esprit calme et serein.
  • 19 h : retour à la maison. Votre production d’adrénaline et de cortisol ralentit progressivement. Vous avez encore jusqu’à 22 h environ pour vous agiter. Votre cerveau a commencé à sécréter de la sérotonine, relaxante et apaisante. Il va bientôt commencer à produire de la mélatonine pour vous préparer au sommeil.
  • 22 h : si vous êtes en couple, c’est l’heure des câlins. Vos hormones sexuelles (œstrogènes, progestérone, testostérone) sont au rendez-vous pour stimuler votre désir. Si vous passez à l’acte, elles seront rejointes par des endorphines et de l’ocytocine, qui amplifieront votre plaisir et induiront une sérénité propice à l’arrivée du sommeil.
  • 23 h : le sommeil vous gagne. La mélatonine, que votre glande pinéale a commencé à sécréter vers 20 h, commence à faire son œuvre. Même si cette hormone est sous dépendance directe de la lumière, elle possède un rythme propre. C’est pour cette raison que vous n’avez pas sommeil en hiver vers 18 h, dès que le soleil se couche. Cependant, sa production est largement conditionnée par le déclin de la luminosité.
  • Pendant la nuit, vos hormones ne dorment pas. Votre hypophyse libère de la vasopressine qui ralentit l’élimination de liquide, histoire que vous ne soyez pas réveillé par une envie pressante d’aller aux toilettes. De la leptine est également sécrétée par vos adipocytes (cellules graisseuses) pour éviter toute faim intempestive qui pourrait déranger votre sommeil. Au milieu de la nuit, la production de mélatonine se tarit. Quelques heures plus tard, le cortisol prendra le relais. Et en route pour une nouvelle journée !

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Ce scénario est le même pour tout le monde, même s’il existe des variations individuelles. Le besoin de dormir après le déjeuner, par exemple, est plus pressant pour certains que pour d’autres. Le sommeil gagne certains dès 21 h, alors que d’autres doivent attendre minuit (ou plus) avoir envie de vous mettre au lit. C’est là que vous devez apprendre à écouter vos besoins et à les respecter. Dans la mesure du possible, bien sûr !

Et quand nous sommes malades ?

Dans les années à venir, la chronobiologie médicale pourrait influencer aussi bien la compréhension des maladies que les méthodes de dépistage (examens sanguins, analyses d’urine ou de selles…) et les heures de prise des médicaments.

D’abord, les saisons ont une influence sur notre santé. Certaines maladies connaissent des pics à des moments bien précis de l’année. Prenez l’hypertension artérielle. Au printemps et en automne, la pression atmosphérique connaît des variations brutales. Cela provoque des changements importants dans le diamètre des artères et les vaisseaux. Tant que vous ne souffrez d’aucun trouble cardiovasculaire, aucun problème.

Mais pour ceux qui souffrent d’hypertension, par exemple, ces changements de pression risquent d’accentuer leurs symptômes. D’ailleurs, dans les trois premiers mois de l’année, le taux des infarctus du myocarde et des accidents vasculaires cérébraux augmente. Cela correspond aussi à une élévation de la production des hormones de stress (adrénaline en tête) en décembre et janvier.

De la même manière, toutes les personnes ayant déjà eu des crises d’asthme savent que les difficultés respiratoires sont plus intenses en fin de nuit et au petit matin (généralement entre 2 h et 7 h, avec un pic vers 5 h). C’est lié à l’activité des systèmes qui gèrent le calibre des bronches. Tout le monde subit un resserrement nocturne de ces minuscules canaux par lesquels l’air est acheminé jusqu’aux alvéoles pulmonaires. Pour ceux qui ont un terrain asthmatique ou allergique, ces modifications (au demeurant légères) suffisent à déclencher ou à intensifier les crises.

« Respectez le rythme de nos hormones et de nos besoins nutritionnels, c’est s’assurer une alimentation optimale ! »

Dr Yann Rougier

Même si la chronobiologie médicale est encore loin d’avoir percé tous les mystères de nos rythmes quotidiens, on sait par exemple que les symptômes de la rhinite allergique sont plus intenses en début de matinée que l’après-midi. Cela correspond au rythme de production de l’histamine (une substance sécrétée par certaines cellules immunitaires en réaction à la présence d’un allergène dans l’organisme) qui provoque une augmentation de la production de liquide par les cellules. Nous pourrions aussi évoquer l’acidité gastrique, plus importante le soir vers 20 h que le matin, ce qui explique que les sensations de brûlure soient généralement plus importantes après le dîner qu’après le déjeuner.

Côté médicaments des variations existent également. Les produits antalgiques, par exemple, sont plus efficaces en fin d’après-midi. A l’inverse, les anti-inflammatoires et les corticoïdes ont une action plus intense lorsqu’ils sont pris le matin, lorsque notre taux de cortisol est au plus haut.  Les médicaments contre l’hypertension artérielle, eux, ont une efficacité maximale lorsqu’on les prend le soir.

D’une manière générale, le simple fait d’administrer les traitements médicamenteux à l’heure optimale permet de diminuer les doses efficaces et d’atténuer leurs effets secondaires. Dans les années à venir, les recherches en chronopharmacologie permettront d’affiner les prescriptions médicales et de les rendre plus efficaces.

Comment vivre au plus près de vos rythmes biologiques

Si les applications médicales et pharmaceutiques de la chronobiologie restent encore du domaine du médecin,  vous avez tout de même entre les mains divers outils pour améliorer votre vie quotidienne. Au programme : le respect de vos rythmes biologiques.

Pour améliorer votre sommeil

La qualité du sommeil est très variable d’une personne à l’autre. Pour les uns, cela va de soi : ils se couchent à heure régulière, dorment paisiblement et se réveillent en forme. Pour d’autres, les nuits sont beaucoup plus compliquées. De nombreux facteurs interviennent : le stress, l’alimentation (voir ci-dessous l’interview du Dr Rougier)… Et aussi le rythme impulsé par l’horloge biologique interne.

Pour les couche-tôt/lève-tôt, ce n’est pas trop compliqué à gérer. Ils se couchent tôt et se réveillent à l’aurore. Seul problème : il leur est difficile d’avoir une vie sociale, d’aller au cinéma le soir ou dîner chez des amis…

Le réglage devient plus délicat pour les couche-tard/lève-tard. Ils ont du mal à s’endormir, mais ils doivent sauter du lit le matin lorsque le réveil sonne pour aller travailler ou accompagner les enfants à l’école. La solution : recaler son rythme naturel pour le rapprocher du rythme social.

Pour les couche-tôt/lève tôt

On parle de « décalage par avance de phase ». La lumière naturelle est d’une grande aide. Le matin, protégez-vous de la lumière naturelle (même si le ciel est nuageux) en portant des lunettes de soleil sombres. A l’inverse, prévoyez de passer au moins une demi-heure dehors en fin de journée, avant le coucher du soleil, sans vous protéger les yeux afin de laisser cette lumière vespérale pénétrer dans votre cerveau. C’est elle qui retardera progressivement votre sommeil.

Procédez ainsi pendant huit à dix jours sans rien changer à vos habitudes, puis retardez progressivement l’heure à laquelle vous vous couchez (10 minutes par jour) jusqu’à trouver un rythme de sommeil qui vous permet une vie sociale et familiale normale. Votre heure de réveil se recalera spontanément. Et si ce n’est pas suffisant, procurez-vous une lampe de luminothérapie et exposez-vous le soir pendant 30 minutes, entre 20 et 21h.

Pour les couche-tard/lève-tard

On évoque plutôt un « décalage par retard de phase ». Le processus de rééducation sera inverse. C’est le matin qu’il vous faut faire le plein de lumière. Faites l’effort de vous lever une heure plus tôt que d’habitude pour aller vous balader avant d’aller travailler. Mais en fin de journée, portez des lunettes de soleil même si le temps est gris, afin de limiter au maximum la lumière du soir qui retarde l’endormissement.

Pour les mêmes raisons, abstenez-vous tout écran émettant de la lumière bleue (ordinateur, tablette, Smartphone…) pendant une heure avant de vous coucher.
Et si ce n’est pas suffisant, procurez-vous une lampe de luminothérapie et exposez-vous le matin pendant 30 minutes, avant 10 h.


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Pour entretenir votre forme physique

Vos rythmes biologiques ne sont pas les seuls impliqués. Votre humeur joue un rôle dans votre fatigue (voir ci-dessous), votre alimentation, votre sommeil (voir ci-dessus)… Cependant, sur un plan strictement physique, votre horloge biologique joue un rôle majeur. On le sait : une activité régulière et adaptée à votre condition physique est essentielle à l’entretien du tonus. Mais encore faut-il pratiquer à la bonne heure.

  • Le matin au lever. Ce n’est pas le moment de trop vous agiter, car vous gaspilleriez votre énergie pour la journée. Mais vous pouvez faire des étirements, du stretching, quelques exercices de yoga ou de Tai-chi… Profitez-en pour vous concentrer sur votre respiration : c’est l’heure idéale pour oxygéner votre corps.
  • En fin de matinée. Tout doux ! Si vous ressentez vraiment le besoin de profiter de votre pause-déjeuner pour bouger, optez pour une marche tranquille ou un cours de gym douce. Mais pas de dépenses exagérées.
  • Après le déjeuner. Rien ! Votre corps aspire au repos, respectez-le.
  • En fin d’après-midi. Vous allez enfin pouvoir donner libre cours à votre goût de l’effort. Vos muscles sont au maximum de leurs capacités. A partir de 17h, vous pouvez pratiquer une activité physique intense : jogging soutenu, squash, tennis, sports d’équipe… C’est à ce moment de la journée que vous pouvez améliorer vos performances.
  • Après 20 h. Stop aux activités intenses. Elles font grimper votre température interne. Or, parmi les phénomènes physiologiques qui induisent le sommeil, on note une baisse de la température interne. Tant qu’elle est trop élevée, vous ne vous endormirez pas. Baissez votre rythme d’activité en douceur.
  • Avant de vous coucher. L’heure est au calme. Vous pouvez tout de même, si vous le désirez, pratiquer une activité tranquille : quelques postures de yoga ou de Qi gong, une séance de relaxation… Ou, si le temps est doux, une petite balade à l’extérieur mais sans forcer, juste pour vous oxygéner avant de vous mettre au lit.

Pour effacer la fatigue

C’est la lumière qui viendra à votre secours. Mais vous l’utiliserez différemment selon l’heure à laquelle vous vous sentez fatigué. C’est pourquoi vous allez d’abord vous observer, afin de savoir quel est le « rythme » de votre lassitude.

  • Si vous êtes plutôt fatigué le matin. Profitez de la lumière naturelle en fin de journée, après 16h. Lorsqu’il fait beau, passez du temps à l’extérieur en fin d’après-midi, sans vous protéger les yeux. Et si ce n’est pas suffisant, optez pour un bain de lumière devant une lampe de luminothérapie,  pendant une demi-heure à forte puissance (100.000 lux).
  • Si vous êtes plutôt fatigué le soir. C’est l’inverse qui vous rendra votre tonus : privilégiez les sorties le matin, avant 10 h, ou faites un bain de lumière devant une lampe avant 9 h, pendant une heure à puissance moyenne (50.000 lux).

Vous vous sentez fatigué ?


Pour vous concentrer, mémoriser, réfléchir

Pour tirer le maximum de vos capacités mentales, vous devez une fois encore respecter vos rythmes biologiques. Car vos capacités de réflexion, de concentration et de mémorisation ne sont pas identiques selon les moments de la journée. Essayez de programmer vos activités mentales et intellectuelles au meilleur moment.

  • Le matin. Démarrez en douceur jusqu’à 10 h, puis attelez-vous à des tâches qui demandent de l’attention et de la rapidité.
  • En fin de matinée. Ralentissez dès que vous sentez que votre concentration faiblit et profitez-en pour effectuer des tâches plus routinières : ranger des papiers, lire des documents qui ne demandent pas beaucoup de réflexion…
  • En début d’après-midi. Votre baisse de tonus intellectuel est normal. Respectez-la pendant une demi-heure après le déjeuner. Et si vous ne pouvez pas vous offrir une vraie pause, consacrez-vous à des tâches simples, sans vous presser.
  • A partir de 14h30/15h. Votre tonus mental grimpe à nouveau, et surtout vos capacités de concentration et de mémorisation. C’est le moment de les mettre à profit.

  • Le soir. Après le dîner, offrez à votre cerveau une plage de tranquillité. Ce n’est pas le bon moment pour plonger dans un dossier compliqué. Si vous avez du retard dans votre travail, mieux vaut vous lever plus tôt demain. Vous serez plus efficace.

Pour stimuler votre bonne humeur

Notre équilibre psycho-émotionnel est soumis aux variations lumineuses, que la période soit particulièrement tendue ou pas. Pour conserver un bon moral en toutes circonstances (ou le meilleur possible), prenez la lumière le matin. C’est à ce moment-là que les rayons lumineux naturels ou artificiels stimuleront la production des hormones cérébrales de l’apaisement. Sortez faire une promenade à l’extérieur, ou offrez-vous un bain de lumière dès que vous vous levez.

Il existe des appareils qui simulent la lumière de l’aube : d’abord très faible, elle s’amplifie progressivement jusqu’à atteindre l’intensité d’une matinée d’été moyennement ensoleillée. Ces appareils se règlent de manière à commencer à diffuser la lumière une demi-heure à une heure avant de vous lever.

En plus, pratiquez une activité physique régulière aux heures les mieux adaptées (voir plus haut). Elle harmonisera la sécrétion des hormones cérébrales, notamment la sérotonine (pour la détente) et de dopamine (pour le tonus et le désir). Progressivement, les variations de votre humeur au cours de la journée s’atténueront et votre moral sera plus stable.

Votre horloge biologique n’est pas si difficile à respecter. Si vous adaptez votre sommeil, votre activité physique et intellectuelle, et même votre alimentation à ces cadences intérieures (voir ci-dessous l’interview du Dr Rougier), vous y gagnerez en tonus, en bonne humeur et en sérénité. Facile, non ?

3 questions au Dr Yann Rougier

Le Dr Yann Rougier, Médecin Spécialiste et neurobiologiste

En quoi notre alimentation est-elle liée à notre horloge biologique ?

Dr Yann Rougier : La chronobiologie appliquée redessine progressivement l’espace de toutes nos fonctions métaboliques. Elle élargit les notions de biodisponibilité des nutriments et de bio-assimilation cellulaires. Enfin, elle offre au monde du complément alimentaire et de la micronutrition une nouvelle impulsion, un nouvel espace d’efficacité. Car notre corps n’assimile pas les nutriments de la même façon selon l’heure à laquelle on les consomme. Et ces variations sont étroitement liées aux hormones qui transmettent à l’organisme les messages délivrés par notre horloge biologique.

En pratique, comment manger pour optimiser nos apports nutritionnels ?

Dr Yann Rougier : Prenez les lipides (les graisses), dont on a dit tant de mal depuis plusieurs décennies. Si au petit-déjeuner vous mangez des graisses animales (un œuf, une tartine beurrée, un morceau de fromage…), l’organisme les utilisera rapidement pour régénérer les parois des cellules. En même temps, cet apport lipidique enverra au cerveau un message rassurant (les lipides ne manqueront pas). En revanche,  le soir, votre corps produit moins d’enzymes capables de traiter ces lipides (les lipases). Si vous consommez beaucoup de gras au repas du soir, votre organisme n’aura d’autre choix que de les stocker.

Les glucides (sucres) sont avec l’oxygène la source d’énergie numéro un des cellules. Si au déjeuner, notre apport en glucides est important, l’organisme les utilisera au cours de l’après-midi. En revanche, si l’on fait un repas très riche en glucides le soir, l’organisme n’en aura pas besoin. On peut néanmoins prendre  au dîner de petites quantités légumineuses et de céréales : elles  contiennent du tryptophane, un acide aminé précurseur de la sérotonine (hormone de la bonne humeur). Or, c’est à partir de la sérotonine que le cerveau produit la mélatonine, l’hormone de l’endormissement.

Les protéines sont constituées d’acides aminés qui ont de multiples missions : production des hormones cérébrales, solidité des tissus articulaires, régénération cellulaire (pas seulement dans les muscles)… Notre corps en a besoin en permanence, y compris la nuit. L’essentiel est de lui en fournir à tous les repas, en quantité raisonnable. Mais il vaut mieux privilégier les protéines animales (volaille, poisson…) le matin et à midi, et les protéines végétales (légumineuses et céréales) au repas du soir. De la même manière, les micronutriments (vitamines, minéraux, oligo-éléments…) possèdent leur propre rythme d’assimilation.

Le respect de ces rythmes alimentaires a-t-il un impact sur les maladies métaboliques liées à l’alimentation, comme le diabète ?

Dr Yann Rougier : Le but de tout thérapeute est « d’épargner » et le plus possible les fonctions biologiques, cellulaires, tissulaires et organiques de l’être humain, et de valoriser leurs expressions physiques, mentales et psychologiques. Il faut donc intégrer le temps et son empreinte (nos rythmes internes) dans la gestion durable de notre santé.

La chrono-nutrition peut ainsi dépasser le cadre du bien-être pour devenir réellement curative, notamment dans les maladies métaboliques. On peut même parler de chrono-nutrithérapie en ce qui concerne les compléments alimentaires qui, eux aussi, sont d’autant plus efficaces qu’ils sont pris à la bonne heure !

Une note pour conclure

J’espère sincèrement que le thème de la chronobiologie vous a passionné autant que nous et que les recommandations pleines de bon sens du Dr Yann Rougier vous aideront à mieux comprendre l’importance primordiale de nos rythmes biologiques pour la santé en général.

Nous avons aussi eu l’occasion de parler largement du rôle prépondérant et de la qualité de votre sommeil. A ce titre, si vous avez besoin d’une aide pour mieux dormir et réduire la fréquence de vos réveils nocturnes, je vous conseille la formule Nuit & Repos mise au point par ACTInutrition.

Je ne veux pas vous faire croire qu’il s’agit d’un produit-miracle (ce n’est pas mon genre) mais juste vous engager à l’essayer : il peut vous faire beaucoup de bien pour favoriser votre endormissement grâce à la synergie valériane-coquelicot-tilleul. Par ailleurs, gardez toujours à l’esprit comme le signale le Dr Rougier dans l’interview qu’une alimentation saine, variée et équilibrée reste le point de départ indispensable pour obtenir un sommeil de bonne qualité. Vous pouvez ajouter la pratique d’une activité sportive régulière.


PS : Les produits que nous recommandons sont sélectionnés selon des critères stricts de composition, d’ingrédients et de qualité de fabrication.
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